HealthManagement, Volume 4 - Numéro 2, 2011

Auteur

Dr Anika Fichelle

Présidente du Comité, de lutte contre la douleur

Hôpital Bichat, Paris, France

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Une Priorité De Santé Publique

La lutte contre la douleur est depuis plusieurs années une priorité de santé publique et constitue un des éléments de la politique d'amélioration de la qualité des soins. La mise en place de programmes nationaux témoigne de la volonté du ministère de la Santé et des professionnels de mieux maîtriser la prise en charge de la douleur. En 1998 a été défini un premier plan de lutte contre la douleur : la circulaire DGS/DH N°98/586 du 22 septembre 1998 relative à la mise en oeuvre du plan d’action triennal de lute contre la douleur dans les établissements de santé publics et privés. Son objectif principal a été d’instaurer une véritable « culture de lutte contre la douleur ».

 

La qualité de la prise en charge de la douleur constituera l’une des clauses relatives à la qualité dans les contrats d'objectifs et de moyens conclus entre les établissements de santé et les agences régionales d'hospitalisation. Elle sera prise en compte dans la procédure d'accréditation conduit par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES).

 

La circulaire DGS/DH/DAS n°99 /84 du 11 février 1999 recommande la mise en place de protocoles de prise en charge de la douleur aiguë par les équipes pluridisciplinaires médicales et soignantes dans les établissements de santé et les institutions médicosociales. En 2002, un plan douleur 2002-2005 précise les objectifs de la prise en charge de la douleur : l’objectif 31 est de prévenir la douleur d’intensité modérée et sévère dans au moins 75% des cas où les moyens techniques actuellement disponibles permettent de le faire, notamment en post opératoire, pour les patients cancéreux (à tous les stades de la maladie), et lors de la prise en charge diagnostique ou thérapeutique (douleur induite par les soins). Élaborer des protocoles de prévention et de traitement pour chaque soin douloureux est particulièrement recommandé. En 2010 la prise en charge de la douleur est devenue une pratique exigible prioritaire (PEP) pour la certification des établissements de santé par la HAS.

 

Prévenir La Douleur Induite Par Les Soins Ou Au Minimum La Rendre Supportable

La liste des soins douloureux est longue et inclut les soins de pratique courante et les actes diagnostiques. On ne doit jamais méconnaître la douleur provoquée par les soins ni la banaliser.

 

Actuellement, les personnels de santé ont à leur disposition des moyens pour prévenir et soulager la douleur applicables dans toutes sortes de circonstances : pose de sonde, cathéter ou chambre implantable ; prélèvements sanguins veineux, artériels ; mise en place de perfusion, injection intraveineuse ; ponction veineuse périphérique, artérielle, ponction de chambre implantable, ponction lombaire, pleurale, hépatique, d’ascite, de moelle osseuse ; biopsie médullaire ou hépatique ; pansements, soins d’hygiène et de confort, soins de cathéters veineux et artériels, de poches de colostomie, de sonde de gastrostomie ; transports ou mobilisations-installations pour examen (radiologie, scanner) ou traitement (radiothérapie) ; endoscopie, points de suture, soins dentaires, séances de rééducation…

 

En dehors du traitement antalgique et avant tout soin, quelques impératifs sont à observer : évaluer l’appré- hension du malade, planifier le soin, regrouper les soins douloureux, informer le patient sur le déroulement du soin (différentes étapes, heure, lieu, durée, délai d’action du traitement antalgique), choisir du matériel adapté au soin, etc.

 

Une Prise En Charge Personnalisée Et Adaptée

Il convient d’anticiper et d’appliquer des protocoles qui tiennent compte du délai d’action des antalgiques : une à deux heures pour un patch de crème anesthésiante, généralement une heure pour la morphine orale. Les protocols mis en place soit en radiologie pour les patients externes, soit conjointement avec les services demandeurs, doivent tenir compte des délais d’action des antalgiques. Avant tout geste potentiellement douloureux, les professionnels de santé doivent prévenir la douleur et mettre en oeuvre un traitement adapté.

 

Le type d’antalgique, la dose, la voie et l’heure d’administration dépendent du soin à dispenser et de l’état Clinique du patient. Observer le patient pendant et après le soin, l’inciter à exprimer ce qu’il ressent et à évaluer le niveau de sa douleur favorisent une prise en charge personnalisée et adaptée (autres doses du même médicament, association d’un autre antalgique).

 

Il n’est pas toujours possible de faire disparaître totalement la douleur lors des soins. Sauf exception, les antalgiques de niveau I et II (opioïdes faibles : tramadol, codéine) sont insuffisants pour contrôler efficacement ce type de douleur. Par contre, cette douleur peut être fortement atténuée par :

les anesthésiques topiques de la peau ou des muqueuses (patch, crème anesthésiante, infiltration tissulaire, spray local, gel de lidocaïne) ;

l’inhalation de MEOPA, combinant analgésie de surface et effet anxiolytique, pour des soins douloureux de courte durée : l’efficacité du MEOPA est maximale après une inhalation de 5 min, son efficacité cesse 3 min après la fin de l’inhalation ;

les antalgiques de niveau III (opioïdes forts) en tenant compte du délai d’action ;

la prise en charge de l’anxiété (anxiolytique, relaxation).

 

Il existe également des techniques alternatives non médicamenteuses.  Parmi elles, seule l’hypnose est utilisable en radiologie. Les autres techniques alternatives non médicamenteuses pour soulager la douleur sont les traitements physiques – massages, kinésithérapie, physiothérapie, balnéothérapie, contentions, éducation posturale et gestuelle – ou des méthodes dites psychocorporelles ou comportementales qui permettent d’apprendre à diminuer l’anxiété et le stress, ce qui a pour effet de minorer la perception de la douleur.

 

L’Evaluation

L’évaluation de la douleur aiguë est aisée et doit être répétée régulièrement pendant la prise en charge. On évalue la douleur du patient au moyen d’outils validés que sont les « échelles » d’évaluation du niveau douloureux. La même échelle doit être utilisée tout au long de la procédure. Les résultats de l’évaluation doivent être traces dans le dossier du patient.

 

L’auto-évaluation est la méthode la plus pertinente d’évaluation de la douleur puisque le patient fait part de son vécu de la douleur. Plusieurs échelles sont utilisables incluant l’échelle verbale simple (EVS), l’échelle visuelle analogique (EVA), l’échelle numérique (EN), l’échelle des visages chez l’enfant de plus de 4 ans et l’échelle des jetons chez l’enfant de plus de 3 ans.

 

Les échelles d’hétéro-évaluation sont utilisées si la communication avec le patient est impossible ou non fiable (patients dits « non communicants »). L’échelle Algoplus® est adaptée à l’évaluation de la douleur aiguë de l’adulte. Chez l’enfant, le score CHEOPS (Children's Hospital Eastern Ontario Pain Scale) a été validé pour l’évaluation de la douleur brève liée aux soins (ANAES 2000) et l’échelle comportementale EVENDOL (EValuation Enfant DOuLeur) est validée pour l’évaluation de la douleur aux urgences (Fournier-Charrière E. et al 2006).

 

Si le soin reste douloureux malgré le traitement préventif, il est nécessaire de revoir le protocole, voire d’envisager une anesthésie générale.

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