HealthManagement, Volume 2 - Numéro 1 / 2009

Auteurs

Dr Alain Isnard

Médecin radiologue sénologue

Médecin coordinateur de l'ARDOC (63) et formateur FORCOMED

Clermont Ferrand, France

[email protected]

 

Prof. Djamel Zighed

Professeur des Universités

Directeur du laboratoire ERIC de l’Université Lyon 2

Président de l’Association, Française d’Extraction et de Gestion des Connaissances

Lyon, France

[email protected]

 

Tous les radiologues reconnaissent la difficulté de l’examen mammographique qui nécessite une grande expertise et une extrême attention. Les radiologues spécialistes détectent autour de 80% des cas des cancers. C’est à cause de cette relative faiblesse du taux de reconnaissance que, dans le cadre du dépistage organisé, en cas d’examen négatif chez le premier lecteur, une seconde lecture est faite par un deuxième radiologue. Cela permet de repérer entre 15 et 20% des cas de cancers parmi ceux manqués à la première lecture, portant ainsi le taux de detection des cancers entre 90 et 95%. L’extension du dépistage à une plus large population, la diminution du nombre de radiologues spécialistes et les exigences de qualité en matière de santé publique rendent indispensable le recours à des technologies capables d’aider les radiologues à traiter davantage de cas tout en améliorant leurs performances. Les systèmes d’aide au diagnostic CAD répondent à ce besoin.

 

Un CAD est un programme informatique capable d’aider le radiologue dans l’identification des anomalies mammaires présentes sur un cliché de mammographie. Le CAD est un outil d’analyse d’image indépendant du mode d’acquisition de la mammographie. Ainsi, il peut traiter des images analogiques numérisées par un scanner ou bien traiter directement l’image issue d’un mammographe numérique. Les CAD sont généralement integers aux stations de visualisation et de lecture.

 

Les CAD De Première Génération

Apparus vers la fin des années 90, à un moment où la mammographie numérique n’était pas encore diffusée, ces CAD proposaient une station complète permettant la numérisation des clichés analogiques, l’analyse des clichés et la vi sua - li sation sur un écran de contrôle des emplacements susceptibles d’être des cancers.

 

Il s’agit le plus souvent d’un signe graphique, d’une croix ou d’un triangle par exemple, pour indiquer des microcalcifications ou des masses (opacités) tissulaires. Le radiologue peut ensuite se référer au cliché original mis sur un négatoscope pour analyser l’anomalie et enfin la retenir ou la rejeter. Pour faciliter l’appariement entre l’anomalie si gna - lée sur l’écran du CAD et le cliché placé sur le négatoscope, le système CAD permet également l’impression sur papier de la vue affichée à l’écran. Le radiologue peut alors conserver une copie de la localisation de l’anomalie sur le cliché qu’il pourra par la suite relire s’il le souhaite.

 

L’arrivée de la mammographie numérique en plaques ou sur capteur plan, qui permet de disposer d’un cliché natif en format numérique, n’a entraîné que la suppression de la phase de numérisation. Ce n’est qu’un peu plus tard, avec l’arrivée des écrans médicaux de lecture à haute resolution 5 Mp, que des adaptations ont été faites pour que les anomalies repérées sur le cliché soient positionnées en temps reel à l’aide d’un signe sur l’écran pour désigner des microcalcifications ou des masses. Grâce aux consoles de lecture, le radiologue peut analyser plus finement l’emplacement incri miné à l’aide des outils de visualisation numérique en jouant sur les paramètres de contraste, de luminosité ou d’autres filtres d’analyse. Ainsi, l’impression de l’image en format papier et l’usage du négatoscope ont été abandonnés. En revanche, la technologie utilisée est identique. Seuls les médias d’acquisition et de restitution ont évolué.

 

Technologies Utilisées

Un CAD utilise deux algorithmes différents fonctionnant de manière autonome et indépendante, l’un repérant les micro - calcifications et l’autre les masses. Le principe general d’analyse se décompose en trois étapes :

Un premier algorithme décompose l’image en un très grand nombre d’imagettes de tailles variées. Ces imagettes sont appelées des régions d’intérêt (ROI: Region Of Interest).

Un second algorithme va extraire de chaque imagette une multitude de paramètres comme la texture, le niveau de gris, la forme etc. Ces paramètres appelés «features» représentent la signature propre à chaque ROI.

Un troisième combine ces « features » pour calculer un score, généralement assimilé à une probabilité de malignité; selon sa valeur, un signe est ou non affiché au dessus de la zone analysée.

 

Pour accomplir les trois opérations précédentes, les cons - tructeurs ont dû exploiter des centaines voire des milliers de clichés. Tous ces clichés ont été préalablement segmentés manuellement ou semi-manuellement par des radiologues. Toutes les régions ont été également étiquetées par le radio - lo gue selon qu’il s’agissait d’une masse ou de microcal ci - fications. Cette base d’exemples étiquetés a ensuite été utilisée pour identifier, parmi les dizaines d’algorithmes de segmentation d’images, les plus performants. Ces zones carac - térisées par des paramètres de texture et de niveau de gris, sont ensuite utilisées par des algorithmes d’apprentissage automatique, comme les réseaux neuronaux, pour identifier le modèle de classement des deux types d’anomalies.

 

Une fois les différents algorithmes d’analyse et de traitement identifiés, ils sont ensuite testés sur des cas qui n’ont pas servi à la construction du modèle. Si le résultat est jugé satisfaisant, une phase d’industrialisation et de commercialisation est lancée.

 

Performances Et Limitations

Les performances rapportées sur les CAD par les publications scientifiques montrent que les CAD permettent de re pé rer plus de 90% des microcalcifications et autour de 70-80% des masses. Les anomalies spécifiques, telles que les ruptures d’architecture, sont encore très difficiles à repérer.

 

Cette première génération de CAD sert juste à mobilise l’attention du radiologue sur des endroits du cliché mais ne fournit aucune explication ou justification. Les analyses des anomalies sont faites de manière indépendante sur chaque incidence sans tenir compte des anomalies visible ou non sur les autres incidences. Aucune évaluation de la gravité de l’anomalie n’est proposée. La contextualisation de l’anomalie selon l’endroit du sein ou selon sa densité n’est pas prise en compte. Il en a résulté un nombre très grand de faux positifs, ce qui a fortement limité l’usage du CAD en routine.

 

Les CAD De Deuxième Génération

Les CAD de deuxième génération se distinguent fortement des premiers, non seulement par leurs performances mais surtout par l’approche.

 

En effet, ces derniers se proposent d’offrir au radiologue non seulement une localisation des anomalies mais également une évaluation du risque de malignité selon la classification BI-RADS®. Ces systèmes sont capables de dire par exemple que telle anomalie de type masse ronde et de contour indistinct est de niveau ACR 3. Ces systèmes sont également capables de tenir compte des résultats sur deux incidences ou plus et de confronter les résultats avec les mammographies antérieures.

 

Bref, ces systèmes exploitent la totalité de l’information disponible dans le dossier mammographique, clinique, échographique etc. Ils permettent aussi d’éditer une des - cription radiologique.

 

Technologies Et Performances

Les technologies utilisées pour la mise au point des CAD de seconde génération reposent sur deux approches: le data - mining qui est une technologie capable d’analyser de grandes quantités de données hétérogènes et multiformes et les systèmes à base de connaissances qui permettent de modé - liser le raisonnement humain.

 

Les performances de ces systèmes collaboratifs laissent entrevoir, et des études en cours le démontrent, une reduction drastique du nombre de faux positifs.

 

La sensibilité et la spécificité peuvent atteindre 99% en ce qui concerne les microcalcifications et 90% en ce qui concerne les masses ; on peut de plus les caractériser et leu affec ter un degré de suspicion selon la classification BIRADS ® de l’ACR. On peut également faire varier sen sibi lité et spécificité de façon interactive et immédiate, et

adap ter les performances du CAD à celles du radiologue. Les technologies utilisées par ces systèmes permettent en outre au système de se perfectionner par apprentissage auto - matique tout en alimentant la base de données.

 

Conclusion

En diagnostic comme en dépistage, les dernières études réa - li sées tendent à montrer une efficacité équivalente entre une deuxième lecture et l’utilisation du CAD associé à la première lecture.

 

Le bénéfice est d’ordre individuel, une réponse rapide évitant des angoisses inutiles et des retards de prise en charge. Il est aussi d’ordre économique. Sachant que le coût de la deuxième lecture en dépistage de masse en France s’élève à 4 euros par dossier, que 8 millions de femmes sont concernées par le dépistage tous les deux ans, si l’on considère un taux de participation de l’ordre de 60%, l’économie réali sée par la nation serait de l’ordre de 20 millions d’euros.

 

Sur le plan de la recherche, une collecte des données obtenues pourrait par ailleurs permettre de développer les performances du CAD et parallèlement d’acquérir une base de données exhaustive tant sur le plan épidémiologique que sur le plan des caractéristiques des cancers, de leurs traitements et des résultats.

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