HealthManagement, Volume 2 - Numéro 1 / 2009

Auteur

Prof. Michel Claudon

President Elect

World Federation for the Ultrasound in Medicine and Biology (WFUMB) Également

Département de radiologie, Hôpital des enfants

Université de Nancy, Nancy, France

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Les ultrasons ont une longue histoire au sein de la médecine: en 1798, Spallanzani avait suggéré que les chauves-souris se déplaçaient «en utilisant leurs oreilles» et dès les années 1930, les premières applications cérébrales étaient envisagées. L’échographie constitue aujourd’hui une activité porteuse, avec un taux de croissance annuel moyen d’environ 8 %. Une enquête menée en France en 2007 a montré que l’échographie vient en deuxième place des dépenses en imagerie pour la radiologie libérale avec un taux de 31,8%, juste derrière la radiologie standard (CR et DR) (38,8%) mais loin devant la TDM (12,2%), l'IRM (9,4%) et la médecine nucléaire (4,5%). En outre, le marché mondial de l’échographie représentait un niveau de revenus pour l'industrie d'environ 4,5 milliards de dollars en 2006. Cet article se propose de donner un aperçu des derniers progress et d'expliquer pourquoi les radiologues doivent continuer à investir sur ce marché en expansion.

 

Si le marché mondial de l'échographie est à peu près le double de celui du scanner (en dollars), la raison en est simple : les appareils d’échographie, bien que beaucoup moins coûteux que ceux de scanographie, IRM et PET, profitent d’une bien plus grande diffusion. Dans la plupart des pays, il n'existe aucune restriction sur l'achat d'équipement, et chaque médecin peut y avoir accès, sans devoir partager son matériel. En outre, les patients apprécient des rendez-vous rapides, l'imagerie en temps réel, le contact et l’échange avec l'opérateur. Cela explique pourquoi, à l'exception des radiologues, de nombreux cliniciens considèrent l'échographie comme une technique nécessaire et utile dans un large éventail de conditions pathologiques ; pour certains reprenant un slogan ancien, l’appareil d’échographie est appelé à devenir le «nouveau stéthoscope».

 

Des Progrès Remarquables Dans La Qualité De l'Image

Une spectaculaire amélioration de la qualité de l'image a été obtenue grâce à divers progrès techniques : sophistication de l'architecture des sondes et céramiques, numérisation totale de la chaîne d'acquisition, capteurs à large bande, émission de pulses et de fréquences multiples, introduction des modes composite et harmonique. Pour un patient donné, la durée globale d'examen demeure approximativement la même, mais les appareils récents offrent une meilleure qualité d'image et un diagnostic plus fiable ainsi que cela a été montré sur des études de validation clinique. Les coûts d'investissement sont stables pour des machines haut de gamme (100 - 200.000 euros) et ont baissé pour les machines de milieu de gamme (50 - 80.000 euros).

 

Une petite révolution est due à l’introduction d’appareils portables performants, caractérisés par un faible poids, une réelle autonomie électrique, une capacité de stockage des images, et une bonne qualité d'image. Ces appareils, disponibles pour un prix raisonnable (10 - 60.000 euros), constituent un nouveau segment qui représente d’ores et déjà environ 10% du marché mondial de l’échographie.

 

L’Imagerie Hémodynamique

Les améliorations en imagerie de flux sont dues principalement à l'augmentation de la sensibilité des modes doppler, ce qui permet de mieux visualiser les flux lents dans des vaisseaux de petite taille ou profondément situés. La principale question à propos du doppler reste le «coût humain» de l'examen échographique, qui est de durée longue et nécessite expérience et compétence. Ce coût a pu être mis en balance par certains managers avec le coût des examens TDM ou IRM, qui sont certes plus chers mais moins opérateurs dépendants et non limités par une obésité ou par la présence de gaz. À l’inverse, le mode doppler commence à être utilisé comme un complément d'hémodynamique dans l’évaluation d'une lésion détectée en scanner ou IRM. Cette approche, certes émergente, mérite d’être prise en compte par les radiologues s’ils veulent conserver le niveau d’expertise dans le domaine.

 

L’Imagerie 3D et 4D

L'imagerie 3D s’est imposée en imagerie prénatale depuis quelques années; elle offre des images saisissantes d’anomalies foetales. Plus récemment, Beryl Benaceraf de Boston a montré que cette nouvelle pratique améliore l’examen échographique foetal en terme d’efficacité et de fiabilité. Elle a constaté que « l’étude anatomique standard d’un foetus pouvait être realise en moins de deux minutes en échographie 3D, et les volumes être interprétés en six à sept minutes. Comparativement, une échographie 2D standard s’effectue en 19,6 minutes en moyenne». De nouvelles sondes matricielles, totalement électroniques, ouvrent aussi la porte à une imagerie 4D avec plusieurs acquisitions volumiques par seconde.

 

Cela ouvre la porte à une modification de la pratique quoti - dienne et du flux de travail, un peu à l’image de l’activité scanographique: les phases de post-traitement et d’interprétation deviennent prépondérantes, décalées de l’acquisition qui devient courte. L’acquisition d’un large volume et non de simples coupes facilite la comparaison inter-examens et améliore le suivi des patientes. Les techniques 3D prennent lentement place en imagerie morphologique, trouvant de plus en plus d'applications (voies urinaires et biliaires, coeur, etc). Quelques articles ont déjà signalé une baisse de la variabilité inter - observateur grâce à l’utilisation de la 3D par opposition aux techniques traditionnelles 2D.

 

L’Echographie De Contraste

L’échographie de contraste (Contrast-enhanced ultrasound, CEUS) est basée sur l'administration intraveineuse de micro - bulles qui renforcent le signal rétrodiffusé. Malgré d'importantes disparités entre les pays, cette technique est en train d’arriver lentement à maturation, l'utilisation croissante des agents de contraste de deuxième génération permettant de visualise les organes en temps réel à de très faibles niveaux de puissance d’émission. En utilisant des séquences non linéaires spécifiques, il est possible de mettre en évidence la macro et la microvascularisation à une cadence d’acquisition élevée.

 

Les premières applications cliniques portent sur la caractéri - sation et la détection de lésions focales du foie ; ont suivi celles concernant le parenchyme rénal, les tumeurs du pancréas, le reflux vésico-urétéral, les traumatismes abdominaux fermés et le doppler transcrânien. Le marché pour les principaux agents autorisés en Europe pour l'imagerie générale et cardiologique (Sonovue ® de Bracco, Italie) montre un taux de croissance annuel actuel d'environ 17%.

 

Les conséquences sur la gestion des patients sont là encore importantes et les services d'imagerie ont besoin de s’adapter : il convient par exemple de prendre en compte la mise en place d’une voie veineuse, le besoin d’être assisté d'une infirmière ou

d’un technicien pour l'injection, un temps d’examen plus long, la nécessité de stocker de longs enregistrements (souvent l’examen total est supérieur à 1 Go), le temps «radiologue» pour le post-traitement. Malheureusement, dans la plupart des pays européens, il n'existe pas de modèle économique de référence couvrant l'ensemble des dépenses et généralement, c’est uniquement le coût de l'agent de contraste (env. 90 euros par flacon) qui est remboursé. Des études médico-économiques multicentriques sont en cours dans plusieurs pays, notamment en France et devraient justifier un prix de remboursement approprié.

 

La Diffusion De l’Echographie Dans Les Spécialités Cliniques

Chacune de ces avancées conduit potentiellement à de nouvelles compétitions entre radiologues et cliniciens. Un exemple en est l'échographie de l’appareil locomoteur, de plus en plus pratiquée par les rhumatologues. L’échographie est aussi maintenant largement recommandée comme méthode de contrôle du positionnement des voies veineuses centrales en reanimation et explique la pression récente des anesthésistes et réanimateurs pour acquérir des appareils, entrant potentiellement en concurrence avec les radiologues dans l’investissement en matériel médical des établissements. Les échographes portables sont de plus en plus utilisés hors du circuit traditionnel de l'hôpital, y compris dans le cadre de l’urgence, avec la volonté d'améliorer la prise en charge de nombreux patients dans les situations les plus critiques, comme l'ont récemment soutenu les spécialistes en médecine d'urgence.

 

Que Doivent Faire Les Radiologues?

Dans ce monde compétitif, la contribution des radiologues devrait être fermement réaffirmée. Pour les radiologues, l'échographie est et doit rester une technique d'imagerie. Les radiologues ont souvent une meilleure expertise technique, sont les mieux placés pour proposer la meilleure méthode d'imagerie diagnostique dans un cas donné, et ne sont pas exposés au risqué d’auto-prescription. Grâce à la sous-spécialisation par organes, ils offrent une expertise dans tous les domaines cliniques, et sont hautement qualifiés pour les post-traitements qu’ils manient sur les différentes modalités d’imagerie.

 

La plupart des départements et des cabinets de radiologie offrent un service 24h/24. Toutefois, l'augmentation de la demande clinique en échographie ainsi que de nouvelles possibilités technologiques doivent être prises en considération. L'organisation des départements dans les hôpitaux ou les cliniques devrait être adaptée et les ressources optimisées. Les radiologues devraient être prêts à déléguer amplement certaines tâches aux members de leur personnel ; dans certains pays, par exemple, des échographistes non médecins, les «sonographers», participent à l’activité . La communication est également essentielle, avec l'objectif de montrer la fiabilité des données échographiques, souvent établie mais ignorée par les médecins généralistes! Cela peut facilement se faire par la diffusion d’informations ciblées au sein des réseaux institutionnels ou régionaux.

 

Des solutions gagnant-gagnant avec les correspondants cliniciens sont souvent plus productives que de sourdes luttes de territoire. La radiologie doit rester un acteur fort dans le domaine des ultrasons. Chaque radiologue a le devoir de promouvoir l'amélioration de la qualité et de la visibilité de l’échographie dans son environnement.

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