HealthManagement, Volume 3 - Numéro 1, 2010

(SISRA) Et Le Dossier Patient Partagé Et Réparti (DPPR)
Auteurs

Dr Pierre Biron

oncologue médical

Directeur du Réseau

Régional de Cancérologie SISRA

Lyon, FRANCE

[email protected]

 

H. Spacagna

Directeur de projet DPPR RRC-RA

 

Dr P. Thiesse

Radiologue coordonateur du département d’Imagerie du Centre Léon Bérard.

 

P. Castets

Directeur Système d’Information

Hospices Civils de Lyon

 

T. Durand

Directeur Information Hospitalière,

CRLCC Léon Bérard et Directeur GCS SISRA

 

Dr P. Dureau

Médecin Généraliste, Vice-

Président URML Rhône-Alpes

 

J-P. Descombes

Directeur Système d’Information,

CHU de Grenoble

 

Dr A. Deblasi

Médecin Coordination

Régionale des SSR

 

P. Vandenbergh

Secrétaire Général

ARH Rhône-Alpes

 

Dr T. Philip

oncopédiatre

vice-président chargé de la santé et du sport de la région Rhône-Alpes

 

Dr F. Farsi

Directeur de projet Accompagnement

Changement

Médecin coordinateur, RRC-RA

 

Rhône-Alpes est la deuxième région française avec environ 6 millions d'habitants, 300 établissements de soins, privés ou publics, et 100 000 praticiens. Rhône-Alpes a mis en place un Système d'information en santé régional organisé autour d’un GCS (Groupement de Coopération Sanitaire) appelé SISRA.

 

Le but de SISRA est de contribuer à la meilleure prise en charge sanitaire et médico-sociale de la population en proposant à chaque professionnel de santé le partage des données médicales grâce à un dossier informatisé et different outils destinés à la coordination des soins. SISRA fournit aussi un numéro d'identification patient régional en attendant un numéro d’identification de santé national non encore disponible actuellement en France. Trois principles majeurs ont guidé SISRA depuis le début : respect des droits des citoyens et des usagers, développement « du bas vers le haut (bottom-up)», et minimum d’intrusion dans les systèmes d’information des établissements. La realisation a été entièrement confiée à des industriels.

 

Aujourd’hui SISRA connecte 55 hôpitaux, tant publics que privés, ce qui représente un tiers des établissements de santé de la région et 66 % des lits hospitaliers. Les membres fondateurs sont les trois hôpitaux universitaires de la region (Lyon, Grenoble et Saint-Etienne), le Centre régional de lutte contre le Cancer Léon Bérard, le réseau de cancérologie ONCORA et une association de médecins libéraux (ADSIMIL). Politiquement, SISRA est piloté par tous les représentants régionaux des autorités de santé en France : l’Agence régionale de l'hospitalisation (ARH-RA), l’Union Régionale des Caisses d'Assurance Maladie ( URCAM-RA), l'Union Régionale des Médecins Libéraux (URML-RA), le conseil régional et une association de patients, le collectif inter associatif sur la santé en Rhône-Alpes (CISS-RA).

 

Le Système Et Son Déploiement

Trois outils forment la base de SISRA :

1. Le STIC :Le Serveur Télématique d’Identité Communautaire est un serveur de rapprochement d’identités permettant à partir des identifiants locaux de fournir un identifiant régional unique grâce à une charte commune d’identification des patients décrivant les modalities de saisie des traits stricts des patients, tels le nom de naissance, le nom de famille, le sexe, la date de naissance et le code postal ou pays du lieu de naissance.

 

2. Le DPPR :Le Dossier Patient Partagé et Réparti est un dossier informatique partagé, réparti signifiant que les données ne sont pas stockées de façon centralisée mais demeurent dans les bases de données où elles ont étés produites. Fonctionnant comme « un veritable moteur de recherche en santé », le système fournit en temps réel l'accès aux documents dans leur forme originale incluant : lettres de sorties hospitalières, comptes rendus de chirurgie, comptes rendus histologiques, résultats de biologie, plans personnalisés de soins, comptes rendus d’imagerie et surtout les images DICOM elles-mêmes…

 

3. La PEPS :La Plateforme d’Échange entre les Professionnels de Santé est une plateforme sécurisée.

 

Outre ces principaux outils permettant le partage des données médicales sur plusieurs sites, d’autres ont été développés  pour faciliter la coordination de soins. Dans cette optique, environ dix applications ont déjà été développées ; elles couvrent des domaines comme l’urgence, l'oncologie, la périnatalité, etc.

 

Quelques Chiffres Sur SISRA

Aujourd’hui, 72 gisements de données sont connectés au dossier régional de santé, soit 54 établissements de soins, 8 Centres de coordinations en Cancérologie, 7 réseaux thématiques, douleurs ou soins palliatifs et 3 unités de service d’urgence privées. Actuellement dans SISRA, 1 600 000 patients – le quart de la population de Rhône-Alpes – disposent d’une clé régionale, 500 000 dossiers patients sont « activables » et 4 600 000 documents sont accessibles. Plus de 35 000 connexions au système sont enregistrées parmois avec 400 000 accès cumulés à ce jour. L’outil Trajectoireest utilisé dans 80 % des recherches d’unités de soinsde suite et de réadaptation (SSR). De plus, 50 % des regionsfrançaises ayant adopté cet outil pour leurs propresrecherches, il est devenu le leader en France dans ce domaine.Basé sur une interface avec les outils locaux, SISRAencourage de fait le développement de l’informatisation localedes établissements en laissant naturellement le choixde ces solutions aux décideurs des établissements.

 Fig.I: Architecture et accés au DPPR

Tous les outils SISRA ont un agrément CNIL. De plus, SISRA garantit une compatibilité et une convergence des outils régionaux avec les différents projets nationaux : Dossier Médical Personnel (DMP), Dossier Communicant en Cancérologie (DCC), et Résumé de Passage aux Urgences (OURAL).

 

Le Fonctionnement

Le dossier patient régional de santé (DPPR) est le service central du dispositif. C’est le lieu du partage de toutes les informations autour d’un même patient pour toutes les pathologies. Nous avons choisi de référencer un maximum d’informations. En effet, nous sommes convaincus qu’il n’appartient pas au producteur de l’information de sélectionner les documents à partager, mais bien à celui qui vient les consulter de trouver l’information qui lui sera utile. C’est pour cela que chaque donnée a été caractérisée suivant plusieurs critères : Le type du document, la pathologie concernée, la spécialité de l’auteur, certains traits de l’information (synthèse, prise en charge en urgence), mais aussi l’auteur, le lieu et les dates de production et de validation des données. L’outil informatique permet ensuite une navigation dans le dossier patient de façon efficace, même si le dossier contient plusieurs centaines de documents.

 

Un Double Intérêt Pour Les Radiologues :

• Pouvoir obtenir plus d’informations sur le context de la demande d’imagerie faite par un médecin correspondant – sachant que la demande ne contient pas systématiquement les éléments nécessaires à la bonne réalisation de l’acte d’imagerie ;

• Rendre communiquant les systèmes de production d’information, usuellement complètement fermés sur eux-mêmes, et accéder ainsi à l’antériorité des comptes rendus et de l’imagerie, ce qui est particulièrement utile pour les collaborations – Groupement d'Intérêt Économique (GIE), Groupement de Coopération Sanitaire (GCS), vacations, etc.– que les imageurs mettent en place pour utiliser au mieux diverses modalités d’imagerie.

 

Le Partage Des Images

Basé sur le fait que les images sont des éléments du dossier partagé au même titre que les comptes rendus textuels, le partage des images signifie la possibilité d'accéder aux images par tout professionnel de santé quelle que soit sa spécialité, s’il est dûment habilité par le patient. Le choix a été de travailler sur des gisements de données en mode réparti.L’infor mation médicale reste stockée dans le lieu où elle estproduite, ce qui permet d’éviter la duplication des données.Ce choix d’architecture devient particulièrement importantpour les images qui nécessitent des espaces de stockagesimportants, existants de par les PACS mis en place, déjà financespar les radiologues ou par les établissements de santé.

 

Le professionnel de santé peut alors accéder aux images DICOM à travers une visionneuse intégrant notamment des fonctions avancées comme le MIP (Maximum Intensity Projection) ou le MPR (Multiplanar Reconstruction). Le radiologue peut donc ainsi accéder aux images antérieures ce qui lui permet d’optimiser son interprétation.

 

L’échange Des Images

Dans ce cas, le professionnel de santé veut obtenir d’un autre professionnel de santé un avis sur des images radiologiques. On parle de télé-consultation, deuxième avis, d’interprétation à distance en astreinte. L’acte médical part d’une demande d’interprétation formalisée, entre deux acteurs qui se connaissent au moins à travers une convention définissant leur cadre d’exercice. Les modalités sont plus légères pour l’échange que pour le partage. Elles ne nécessitent pas initialement la présence d’un PACS.

 

La solution technique consiste à installer dans l’établissement un composant qui d’un côté échangera en DICOM avec les modalités d’imagerie et de l’autre avec la plateforme régionale en mode sécurisé. Tous les accès se font avec la carte CPS via le portail régional dans lequel chaque professionnel de santé peut accéder à tous les services disponibles.

 

L’Audit Externe

SISRA a fait l’objet, comme 10 autres projets européens, d’un audit externe par un consultant indépendant missionné par la Commission européenne pour analyser l’impact économique et celui sur la qualité de la prise en charge des patients, de systèmes d’informatisation en santé déjà implémentés. Il a considéré que des bénéfices commençaient à se dégager dans SISRA à partir de 2008 soit 5 ans après le début de l’implémentation, suggérant un bénéfice tangible et progressif à partir de 2011 tenant compte d’un investissement cumulé de 17 millions d’euros depuis 2001.

 

Selon cet audit, les leçons à retenir du projet sont : une planification réaliste dans la durée, la construction d’un système tenant compte des expériences précédentes réussies, la contribution aux objectifs stratégiques et opérationnels requis pour des établissements de santé. La capacité d’interopérabilité et de « transférabilité » du système a été déterminante dans le succès de SISRA.

 

Conclusions

Les principes directeurs de SISRA sont le respect des choix informatiques et du niveau d’informatisation de chacun des utilisateurs potentiels, l’appel aux industriels pour le développement et l’intégration des solutions, un contact au plus près de l'environnement. Une équipe spécifique d’accompagnement du changement a été créée pour aider à la mise en oeuvre et l’implémentation.

 

En dix ans, nous sommes passé d’une situation où rien ne prédisposait les gens à travailler ensemble au-delà du strict nécessaire, où chacun restait frileux, sur sa réserve et dans les craintes d’intrusion et où seule une minorité de pionniers se sont lancés dans l’aventure, à une situation où les freins diminuent régulièrement et où de plus en plus de personnes sont impliquées et demandent de plus en plus de services. L’objectif n’était pas seulement la mise à disposition des outils mais aussi l’accompagnement vers ce changement culturel.

 

SISRA est un système cohérent et pragmatique de mise à disposition en temps réel des données médicales utilisant les moyens modernes des technologies de l’information. Il utilise un fonctionnement sécurisé sur Internet et les moyens de stockage disponibles. Il permet d’accéder de façon fiable et confidentielle aux données de partout et à n’importe quel moment, et constitue une aide à l’organisation et à la coordination des soins. En dix ans, des investissements ambitieux ont été faits sous l’égide d’une politique volontariste et l’action déterminée d’un comité de pilotage dynamique et pragmatique, respectueux des choix de chacun, et attentif à fournir une assistance constante aux utilisateurs.

 

Finalement, ce système de plus en plus utilisé permet d’envisager à terme des économies dans les pratiques médicales et le coût de la santé, et surtout d’améliorer la qualité de prise en charge des patients.

 

La qualité du projet, le succès auprès des utilisateurs, les impacts santé publique et économique positifs qui en découlent ont été reconnus en octobre dernier par l’ « European Association of Healthcare IT Managers » et ses pairs qui ont distingué ce travail en lui décernant le premier IT @ Networking Award.

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