HealthManagement, Volume 6 - Numéro 1, 2013

X Suivi Du Commentaire Du Prof. Hubert Ducou Le Pointe
Auteurs

Dr Eugenio Picano

Directeur général

Institut de physiologie clinique

Conseil national, de recherches

 

Dr Giuseppina terranova

Médecin en gestion

des risques

ASL 5

 

Antonio Dodaro

Avocat Consultant

Unité SFI-Lecce pour les droits des patients

Pise, Italie

[email protected]

 

La conscience du risque est théoriquement essentielle pour determiner la pertinence d’un examen et chaque médecin devrait avoir une bonne connaissance des doses et des risques à long terme des examens d’imagerie et de médecine nucléaire. Dans la pratique, de récentes recherches dévoilent que les patients, mais aussi des médecins demandeurs d’examen en ont une profonde méconnaissance. Il est possible que le jargon difficile de la radioprotection, dans laquelle les doses sont exprimées dans différentes unités souvent ésotériques (les mégabecquerel, millicuries, kilovolts, etc.) ne favorise pas l’accès aux informations simples ni à leur interprétation.

 

L’inefficacité de la communication pose actuellement de graves problèmes éthiques pouvant être à la source de nombreux contentieux. Pour établir une relation respectueuse et éthique entre le médecin et son patient le consentement éclairé est, idéalement, indispensable. Il devrait être utilisé selon un processus précis faisant que le patient participe activement à la prise de la decision médicale. Ce consentement éclairé devient une composante essentielle de la communication entre le médecin et le patient et, d’un point de vue juridique, partie intégrante de l’acte medical fondé sur un dialogue continu entre le patient et le médecin, que l’on pourrait appeler « vigilance mutuelle ».

 

Un formulaire de consentement informatif, clair et honnête devrait préciser le type d'examen et la dose efficace en millisievert (mSv) à partir des valeurs de référence recommandées par les constructeurs ou, mieux, des valeurs réelles du service. L'équivalent de dose devrait également être exprimé en nombre de radiographies thoraciques et le risque de cancer en nombre de cas supplémentaires dans la population exposée, en tenant compte des directives les plus récentes émises par un organisme qui fait autorité (par exemple, le rapport BEIR VII de l’Académie nationale des sciences aux États-Unis, de 2006). Publié récemment, le rapport officiel de l'American College of Radiology (ACR), recommande aux médecins « de travailler avec les associations de défense des patients afin de communiquer plus efficacement sur l’équation bénéfices en matière de santé vs potentiels risqué qui se pose avant chaque examen d'imagerie ». Les médecins se voyant dans l’obligation d’expliquer aux patients ce qu'ils ignorant encore actuellement, ils vont naturellement devoir s’informer sur ce qu’ils devraient déjà connaître !

 

Chaque examen radiologique ou de médecine nucléaire confère un risque de cancer faible mais réel à long terme [1]. Pourtant, les informations que l’on donne aux patients, quand elles existent, sont souvent inexactes. Si une information trop détaillée concernant la dose et le risque de cancer peut être une source d'anxiété pour le patient, l'information qui se veut « économe avec la vérité » peut violer les droits fondamentaux des patients (voir la Convention d'Oviedo* en 1997) et la loi (la directive Euratom 97/43** en 1997). Le principe de l'autonomie décisionnelle du patient « Les médecins doivent donner à leurs patients les moyens de prendre des décisions éclairées concernant leur traitement » est l'un des trois principes fondamentaux de la charte du professionnalisme médical pour le nouveau millénaire [2].

 

La Sensibilisation Des Patients

On s’aperçoit qu’il n’est pas d’usage de recourir au consentement éclairé pour les examens radiologiques. Quand il est pratiqué, les patients sont le plus souvent incomplètement informés, meme quand ils sont confrontés à des niveaux considérables d'exposition et à des risques à long terme. Le risque que fait courir un coroscanner avec un scanner à 64 barrettes peut atteindre 1 pour 100 chez une jeune femme ou un enfant. La majorité des pédiatres de la région du grand Toronto au Canada se sont accordés sur le fait qu’un examen comportant un risque supérieur à 1 pour 10 000 ne doit être effectué qu’après discussion avec les parents. En réalité, les patients ne sont pas informés sur les risques, les avantages, et la dose de rayonnement que comporte un scanner, meme pour des niveaux de risque considérablement plus élevés.

 

Dans une autre étude réalisée dans le service des urgences d'un centre médical universitaire américain, des patients adultes ont été interrogés après avoir effectué un examen de tomodensitométrie. Seulement 7 % d’entre eux ont déclaré avoir été informés des risques que comportait cet examen, mais aucun n’a pu en estimer la dose en nombre de radiographies pulmonaires et seulement 3 % d’entre eux estimaient que leur risque cumulé de cancer avait été augmenté par cet examen. Dans une autre etude réalisée dans le service de médecine nucléaire d'un centre universitaire italien, 79 % des patients interrogés pensaient que la scintigraphie myocardique de stress qu’ils avaient effectuée avait représenté une dose de rayonnement inférieure à une radiographie pulmonaire – la valeur réelle est de 500 radiographies pulmonaires – et 40 % pensaient qu’il n’y avait absolument aucun risque de cancer. Pourtant, 71 % des patients pensaient avoir reçu de leur médecin une information bonne à excellente sur les risqué et les avantages de cet examen.

 

La Conscience Qu’a Le Corps Médical Du Risque Des Rayons X

Des études récentes témoignent de la grande méconnaissance des patients, mais également des médecins prescripteurs concernant les doses d’exposition et les risques associés aux examens. En théorie, un médecin devrait connaître les doses associées à chaque examen – qui pourront alors être judicieusement effectués car plus appropriés – et les risques encourus à long terme. Selon de récentes études effectuées auprès de médecins au Royaume-Uni, de chirurgiens orthopédistes en Israël, de cardiologues en Italie, de pédiatres au Canada, et de radiologues universitaires aux États-Unis, la plupart des médecins sous-estiment largement (jusqu’à 500 fois) les doses de rayonnement des examens les plus courants et les risques de cancer qui leur sont associés.

 

Aucun médecin urgentiste ou radiologue ne pouvait fournir une estimation précise des doses reçues lors d'un examen tomodensitométrique, et ce quel que soit leur niveau d'expérience. 5 % des radiologues en particulier estimaient que la dose perçue lors d'un scanner était moins importante que celle d’une radiographie thoracique, et 56 % estimaient que la dose reçue pouvait être estimée équivalente à moins de dix radiographies thoraciques – ce qui est une sous-estimation inquiétante de la dose véritable, d’environ 500 radiographies thoraciques. Si 40 % des pédiatres sous-estimaient jusqu'à 100 fois la dose d'un scanner sans et avec injection de produit de contraste, certains souffraient également de ce que l'on pourrait appeler le « daltonisme d’imagerie », c'est à dire l'impossibilité de faire la différence entre les techniques « vertes » (nonionisantes) et « rouges » (ionisantes). Parmi les médecins britanniques, 5 % ne savaient pas que l'échographie n’utilisait pas de rayonnements ionisants, et 10 % que l'IRM n'en utilisait pas non plus. Parmi les pédiatres canadiens, 4 % croyaient que l'échographie en comportait et 12 % ne savaient pas que les SPECT- CT en comportaient. Dans un tel contexte d’absence de conscience du risque des rayons X, les examens inappropriés peuvent proliférer, au détriment profond de la société et des patients.

 

Le Niveau d’Information

Il y a trois façons de traiter des risques en imagerie : ne pas en faire mention, les sous-estimer, ou en faire une description détaillée.

 

Stratégie n°1 : « Pas Un Mot »

Certaines personnes pensent qu’il est préférable de ne pas mentionner les risques. Même si des procédures engagent de fortes doses de rayonnement comme les interventions sous contrôle fluoroscopique, aucune mention explicite ou implicite n’est faite concernant les risques à long terme. Le risque existe et peut être important, il n’en reste pas moins inconnu (par le patient) et non formulé (par le médecin). Leur argument principal est que les radiologues sont trop occupés pour consacrer du temps à l’obtention du consentement éclairé et qu’ils sont de toute façon suffisamment conscients et responsables pour éviter de procéder à des examens inappropriés. Le droit légal des patients à l’information se voit éclipsé par les deux forces de l'efficacité et du paternalisme, offrant une vision très réduite de l'autonomie individuelle qui pourrait se traduire par « le médecin a le savoir ». C’est la nature du risque (le fait qu’il soit à long terme) et non sa valeur absolue qui est mise en avant pour ne pas respecter le consentement éclairé.

 

Stratégie n°2 : La Discrétion

Pour d’autres types de risque, la question de l'efficience ne se pose pas et l’obtention d’un consentement éclairé écrit fait partie de la pratique courante – avant injection d’un produit de contraste par exemple. Mais on peut se demander quelle qualité d'information est alors donnée aux patients. Sur les sites de sociétés scientifiques, dans la section information aux patients et dans les formulaires de consentement éclairé qu’on leur propose de signer, on peut lire des déclarations comme « Un examen de médecine nucléaire est sans danger, sa dose de rayonnement équivaut à une simple radiographie » ou « est presque toujours inférieure à celle d’un examen radiologique courant ». Les patients et les médecins pourraient croire qu’un « examen radiologique courant » ou « une simple radiographie » sont une radiographie pulmonaire, qui est de loin l'examen le plus simple et la plus courant en radiologie. En réalité, l'exposition pour des examens myocardiques en medicine nucléaire varie de 500 radiographies pulmonaires pour une scintigraphie de perfusion à 1 500 radiographies pulmonaires pour une scintigraphie de stress utilisant deux traceurs. Ces declarations imprécises sont sans doute destinées à rassurer les patients et à éviter d’éveiller des craintes inutiles à propos d’un risque inévitable. Néanmoins, cette attitude qui consiste à présenter un discours uniciste confondant tous les examens d’imagerie conduit les médecins à sous-estimer les risques associés.

 

Stratégie n°3 : Une Information Complète

Certaines organisations comme le National Institutes of Health (NIH) aux États-Unis, décrivent les risques radiologiques en des termes plus francs, tout au moins lorsque l’examen est effectué dans le cadre d'un projet de recherche et pour des doses de rayonnement supérieures à 15 mSv (ce qui correspondant à la dose moyenne d’un coroscanner) : « Votre scanner vous expose aux rayonnements. Si l’on ne tient pas compte des variations entre individus, votre exposition corps entier lors de chaque scanner sera d'environ 15 mSv, ce qui équivaut à environ cinq fois la dose annuelle moyenne de rayonnement reçue aux États-Unis par le rayonnement naturel. Bien que cela ne doive pas entrainer des effets préjudiciables, le risque de dommages à long terme du fait de ce degré d'exposition aux rayonnements pourrait être de 1 pour 1 000 et se traduire par le développement d’un cancer ou des modifications génétiques ».

 

Le Processus De Consentement Eclairé Idéal

L’existence d'un consentement véritablement éclairé se heurte à la double pression d'une vision ancienne et paternaliste de la medicine et de l’objectif d’efficience des modernes. De plus, la sensibilité bien connue des leaders d'opinion et des médias aux interest de l'industrie peut influencer la diffusion de l’information en favorisant une sous-estimation et une confusion du niveau des risques. C’est ce qu’a écrit Michael Crichton, alors jeune diploma en médecine de Harvard dans un article paru dans le New England Journal of Medecine : « La rédaction médicale est un exercice calculé et très élaboré visant à embrouiller le lecteur » ; elle y excelle en ce qui concerne le risque des rayons X !

 

Dans un processus de consentement idéal, la règle de communication du risque adoptée pour le rayonnement reçu au cours d'un projet de recherche pourrait avantageusement être suivie dans la pratique clinique. Le formulaire – vu comme un outil fonctionnel mais non exhaustif qui permet d’être en accord avec la loi qui demande la mise en oeuvre correcte d'un consentement acceptable – devrait énoncer au moins le type d'examen, la dose efficace engagée lors de l'exposition (mSv), son équivalent en nombre de radiographies pulmonaires et le risque supplémentaire de cancer qui pourrait intéresser la population exposée. Cette information minimale constitue la base juridique permettant de developer un dialogue plus large qui nous semble aussi utile que bénéfique dans un processus de consentement éclairé, en radiologie comme en médecine nucléaire.

 

Le diagramme 1 souligne la relation linéaire entre la dose et le risque. Elle peut aider à transmettre des informations aux patients ou à des collègues, car ce diagramme est complémentaire du format tableau traditionnel (voir figure 2) et le codage couleur permet de comprendre les niveaux de risque. Une stratégie de communication factuelle, utilisée lors de la discussion qui accompagne le consentement éclairé, permet une meilleure prise de conscience des risques liés à l’imagerie par les médecins et les patients. Cela nous aidera à éviter les petits risques individuals qui, à l’échelon de la population, deviennent des risques considérables. L’utilisation de ces formulaires permettrait aussi de réduire la pression qu’exercent les patients pour obtenir des examens redondants et souvent inutiles.

 
Diagramme 1 : Dose (en abscisse, en nombre de radiographies pulmonaires) et risques (en ordonnées, calculés à partir du rapport BEIR VII, 2006) des examens couramment pratiqués et prenant en compte les valeurs de la figure 2.

Le bon sens, la déontologie, les droits des patients, les directives en imagerie médicale, le droit Euratom**, suggèrent, encouragent et recommandent tous, de manière cohérente et concordante, une utilisation responsable et éclairée des examens d’imagerie exposant à des rayonnements ionisants. Cela doit avoir une influence sur notre pratique. Les médecins ignorant des doses et des risques que présentent les examens exposant à un rayonnement élevé – en particulier dans le cas des examens inappropriés, qui constituent un fléau général de la pratique médicale générale – deviendront difficilement défendables. La loi impose des limites strictes pour la population générale (1 mSv par an) et pour les travailleurs exposés au niveau professionnel (20 mSv par an). Mais paradoxalement, un citoyen, en devenant patient, perd ses « droits radiologiques » et peut être exposé à une dose équivalente à des centaines de mSv sans recevoir la moindre information préalable et, si les examens sont inappropriés, sans que cela ne lui procure aucun avantage. Il est peut-être temps de changer, et le consentement éclairé peut nous aider à effectuer ce revirement salutaire et nous faire passer d'une culture de paternalisme et de surdiagnostic à une nouvelle culture prônant la sécurité, la prudence et la pertinence.

 

L’Approbation De l’Agence International De l’Energie Atomique

Cette approche a été officiellement approuvée en 2010 par l'Agence internationale de l'énergie atomique. Elle décrivait combien un consentement véritablement éclairé était une exigence fondamentale pour toutes les procédures radiologiques, et un acteur clé de la « stratégie 3A », (3A pour « Awareness, Audit and Appropriateness » autrement dit Sensibilisation, Audit et Pertinence) nécessaire pour developer le processus de justification pour les procédures radiologiques. De la même façon, les recommandations récentes de la Food and Drug Administration (FDA) visent à optimiser l'exposition du patient aux radiations induites par les examens d'imagerie médicale, et à en réduire ainsi les risques tout en optimisant leurs avantages : « chaque patient devrait obtenir l’examen d'imagerie adéquat, au bon moment, avec la dose de rayonnement appropriée ».

 

Pour cela, il est nécessaire d'accroître la sensibilisation des patients. La FDA « reconnaît l'importance de l'autonomisation décisionnelle des patients, ce qui passe par leur information et des outils pour les aider, avec leurs médecins, à gérer l’exposition aux rayonnements liés à l'imagerie médicale ». Le formulaire de consentement éclair est un outil essentiel pour atteindre cet objectif encore bien illusoire.

 

Pour nous, une stratégie efficace de communication sur les risques radiologiques devrait inclure :

• le partage équilibré d'informations avec les patients, l'écoute de leurs préoccupations, en les encourageant à poser des questions et en soutenant leur capacité à prendre une décision éclairée ;

• pour les examens impliquant une forte exposition aux rayonnements ionisants (risque de cancer de 1 pour 1 000 à 1 pour 10 000), la documentation de l’information, sous forme de brochures écrites dans des termes et dans un format adaptés, enrichies de diagrammes et de tableaux et accompagnées d’un formulaire de consentement à signer par le patient et par le médecin qui lui a donné les informations ;

• pour les examens et procédures impliquant une faible exposition aux rayonnements ionisants (risque de cancer inférieur à 1 pour 100 000), des affiches informatives apposées dans les salles d'attente et les espaces publics, mais sans consentement écrit.

 
Figure 2 : L’approche du Royal College of Radiologists (RCR)

Conclusion

Un consentement éclairé véritable joue un rôle essentiel dans la relation médecin-patient. Un formulaire de consentement approprié, complet et actualisé devrait pouvoir prendre place au sein d’un processus dans lequel l'acceptation de l’acte diagnostique et/ou thérapeutique est la résultante de trois étapes différentes, logiquement et chronologiquement liées :

• une information diagnostique et/ou thérapeutique scrupuleuse et complète qui, en ce qui concerne la radiologie et la médecine nucléaire, devrait se focaliser sur l'équivalent de la dose en nombre de radiographies pulmonaires et sur le risque de cancer ;

• le fait de s'assurer que le patient a bien compris les notions et le sens de ce message. On peut se faire aider par des outils et des techniques (comme un enregistrement video de la rencontre, ou la demande au patient de réexpliquer ce qu’il a compris) qui ont leur utilité au niveau juridique ;

• la prise de décision finale concernant l’acte diagnostique et/ou thérapeutique proposé.

 

On ne peut pas approuver sans avoir compris, et sans avoir participé aux processus de communication et de décision. Sans la présence de ces éléments essentiels, aucun modèle de consentement ne peut être considéré comme juridiquement valable. Ce processus de consentement éclairé et sa formulation vont insensiblement pousser le médecin à être plus conscient de ce qu'il fait, et le patient plus conscient de ce qu'il va traverser, ce qui leur permettra à tous deux de realise des choix plus responsables.

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