HealthManagement, Volume 6 - Numéro 1, 2013

Auteur

Dr liliane ollivier

Département d’imagerie

Institut Curie

Paris, France

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Depuis 2007, le « groupe Info Patient » de la SFR travaille à la tâche d’informer les patients sur les procédures, les risques, les indications des examens, mais aussi sur les droits des patients, en particulier dans les services d’imagerie. La mission de ce groupe s’intègre dans la démarche d’amélioration de la prise en charge globale des patients dans les services d’imagerie médicale.

 

Donner La Parole Aux Patients Et Aux Professionnels

Pour cela, dans nos sessions thématiques au cours des différentes JFR, nous avons donné la parole aux professionnels, radiologues mais aussi manipulateurs, qui travaillent dans ce but et qui se posent régulièrement des questions sur l’éthique, la communication avec les patients, la bientraitance, le handicap, tous sujets qui avaient souvent été considérés comme ne faisant pas ou peu partie de notre activité, car cette activité semblait essentiellement centrée sur l’image et le service rendu aux prescripteurs.

 

Nous avons aussi donné la parole aux patients en réalisant et publiant les résultats de plusieurs enquêtes faites auprès de patients ou du public concernant leurs attentes, leurs préférences et leurs craintes lors de leurs passages dans les services d’imagerie. Des comités de patients et des patients eux-mêmes ont pu témoigner lors de ces sessions aux JFR, mais aussi dans des publications, dans la presse médicale ou grand public et dans les différents média.

Une place importante a été faite dans nos sessions à l’introduction à l’hypnoanalgésie, technique utilisée avec succès pour rassurer les patients en sénologie interventionnelle et en IRM, en particulier pédiatrique et mammaire.

 

La Relation Médecin - Patient

Actuellement, parmi les nombreux projets portant sur la qualité de vie, très peu s’intéressent au ressenti des malades et de leur famille ou à leurs préférences lors de leur passage dans le service d’imagerie médicale. De grandes enquêtes nord-américaines réalisées dans les années 1990 ont étudié les preferences des médecins traitants et des radiologues concernant la façon de délivrer les résultats aux patients. D’autres ont montré que les patients préféraient obtenir immédiatement les résultats du radiologue plutôt que d’attendre la consultation avec le médecin référent. Mais aucune n’a abouti à l’écriture de recommandations ou de formations spécifiques à l’annonce des resultants en imagerie médicale, et n’a développé la réflexion sur les relations entre les médecins et les patients.

 

Notre projet* a consisté à mettre en place et à mener une enquête auprès des patients lors de leur passage dans le service d’imagerie, avec un triple objectif : tout d’abord connaître de façon objective les préférences et les attentes des patients sur tous les aspects de leur prise en charge dans le service et à partir de l’analyse quantitative et qualitative des réponses à un questionnaire ; apporter les modifications et améliorations attendees dans l’organisation et le fonctionnement quotidien du service ; publier et diffuser les résultats pour informer le plus largement possible et faire participer d’autres services d’imagerie.

 

Pour améliorer la prise en charge des patients dans les services d’imagerie médicale, il importe que tous les membres du personnel médical et non médical soient impliqués car le moindre détail, la moindre fausse note, dans le contexte hostile de la maladie, peut détériorer la perception que le patient a de la qualité de sa relation avec l’environnement matériel et humain. Les bonnes intentions, maintes fois répétées, sont louables, mais il importe qu’elles se traduisent très concrètement à toutes les étapes du parcours du patient : accueil, orientation, attentes, examens complémentaires, consultations… Les examens d’imagerie sont parfois nombreux et répétés au cours de l’évolution d’une maladie. Les patients connaissent l’importance des résultats pour la suite de leur affection et leur incidence sur le traitement.

 

Le Radiologue, Premier Interlocuteur

Dans le service d’imagerie, l’accueil, l’attente, la relation avec les différents membres de l’équipe, la pénibilité de certains examens, mais surtout l’appréhension des résultats peuvent être autant de sources d’angoisse. Tous les éléments de communication, ce qui est dit et la façon de le dire, les non-dits, les maladresses risquent de majorer la fragilité des malades. Bien souvent, c’est le radiologue qui découvre des anomalies et doit trouver les premiers mots. La tâche est d’autant plus ingrate qu’il n’a reçu, le plus souvent, aucune formation spécifique pour la gestion des situations difficiles telles que l’annonce de mauvaises nouvelles, mais aussi pour des situations quotidiennes plus banales telles que l’interrogatoire médical, l’annonce d’un examen normal ou encore la décision d’une biopsie, voire même simplement d’une autre incidence. Bien communiquer avec le patient, éviter d’ajouter à son angoisse, cela peut aussi s’apprendre.

 

Si, après un examen d’imagerie, beaucoup de patients ne demandent rien, d’autres au contraire exigent de voir le médecin et sont prêts à attendre que l’examen soit interprété. Toutes nos enquêtes aboutissent à la confirmation des inquiétudes et des preferences des patients : c’est le résultat qui constitue en lui-même la source la plus importante de leurs angoisses. Pour l’annonce des résultats, le radiologue est considéré par les patients comme un interlocuteur privilégié. Quelles que soient les conditions, les patients doivent être reçus dans un cadre adéquat, au mieux une salle dédiée. L’attitude attendue du praticien consiste en une acceptation du dialogue laissant le libre choix au patient de s’exprimer et de poser des questions, en le regardant franchement et en l’écoutant sans jamais trop en dire, sans aller au-delà de sa demande.

 

Certains patients, malgré des traitements signifiants, connaissent mal leur maladie ou ne veulent pas la connaître. S’ils sentient que le médecin est disponible et à l’écoute, ils peuvent profiter de cette occasion pour parler, poser des questions qu’ils n’ont jamais posées, parfois s’épancher. C’est souvent à ce moment- là qu’ils évoquent le traumatisme qu’ils ont pu subir suite à une remise d’information un peu brutale lors d’un examen précédent. De nombreux patients nous font part de l’épreuve que représentent pour eux les bilans de contrôle : les manifestations de leur soulagement en fin d’examen, quand ils apprennent que tout est normal, en disent long sur l’angoisse qu’ils ont vécue.

 

Les Phrases Qui Tuent

D’autres membres de l’équipe ont travaillé sur une plaquette didactique intitulée « les phrases qui tuent » rassemblant quelques phrases parfois anodines, parfois terribles, toutes réellement entendues au cours de leur maladie, rapportées par les patients, et qui leur ont fait vraiment mal. Ces phrases, nous les avons tous entendues, voire même prononcées un jour. C’est dans un but pédagogique et non accusateur que nous les avons réunies, à l’usage de nos collègues, pour qu’ils trouvent eux-mêmes l’« antidote » et retrouvent et utilisent les mots qui, à l’inverse, font du bien et dont les patients se souviennent aussi. Cette plaquette, réalisée sous la forme d’une bande dessinée humoristique, sert également à l’enseignement des étudiants, en particulier à ceux du DES. Une prochaine bande dessinée sur le même sujet mais plus particulièrement centrée sur l’imagerie est en cours de préparation et sera disponible aux prochaines JFR.

 

Les Fiches d’Information

Le travail sur les fiches d’information est plus ingrat et suscite moins d’ardeur au sein du groupe, mais deux fiches informatives à l’attention du public ont été créées : l’une concerne les rayonnements ionisants (travail du groupe Radioprotection et du groupe Info Patient en collaboration avec l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l’IRSN), et l’autre a été établie en association avec le groupe Agents de contraste. Les deux fiches sont consultables sur le site de la SFR. Les reunions du groupe ont permis aux plus actifs d’entre nous de revoir plusieurs fiches sur les examens radiologiques – celles-ci émanaient de services qui avaient mis au point le contenu tech- nique et dont nous avons tempéré le « jargon médical » – à la lumière de l’information donnée au patient et par le patient. Car, dans notre métier, l’information doit être partagée.

 

S’Inspirer Du Travail d’Autres Instances

Le premier atelier sur la relation radiologue - patient a été mis en place par des membres du groupe. Les difficultés que nous rencontrons chaque jour ont été mises en situation grâce à l’aide d’un intervenant radiologue et d’une psychanalyste specialise dans les rapports soignants - soignés. Les participants le disent, cette première expérience doit être renouvelée. On peut relire les nombreux articles de notre confrère américain Leonard Berlin traitant des enquêtes menées auprès des patients qui participant volontiers à nos questionnements et nos questionnaires ! L’American College of Radiology s’en est beaucoup inspiré et, depuis plus de 20 ans, a publié des recommandations qui évoluent au cours du temps et avec les mentalités.

 

La prise de conscience des différentes instances de l’imagerie en Europe en matière de communication avec les patients, a donné lieu à la parution en février 2013 de recommandations européennes écrites par différents groupes de l’ESR, témoignant d’une volonté d’homogénéisation des pratiques européennes. C’est important car la place du sujet patient, celui auquel nous devons des comptes avant le médecin prescripteur – comme le dit L. Berlin « it is the patient to whom radiologists owe a duty to serve » – doit être au centre de l’imagerie.

 

En Conclusion

Le bilan du « groupe Info patient » sur les six dernières années écoulées est double : nous avons travaillé à l’amélioration de la prise en charge des patients en imagerie médicale et nous avons suscité un intérêt véritable pour le sujet. La preuve en est de ce dossier entièrement consacré au patient… Nous nous réjouissons de voir de nouveaux venus adherent à nos projets et aussi de sentir que ces projets auront toujours, dans l’avenir, une place privilégiée dans ceux de la Société Française de Radiologie.

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